Après le subprime, la crise de l'immobilier commercial menace les bilans des établissements financiers régionaux.
Le signe le plus visible de la sévérité de la crise aux États-Unis est la multiplication des boutiques vides dans les centres commerciaux. Les panneaux For rent (à louer) fleurissent aussi dans les rues de quartiers jadis très fréquentés par les accros du shopping.À ces pancartes s'ajoutent sur les façades des immeubles de bureaux d'immenses placards For lease, rappelant la disponibilité soudaine de milliers de mètres carrés d'espaces vacants pour des hangars, des bureaux ou des usines. Même dans la région de Washington, moins touchée par la crise que la Californie, la Floride ou l'Arizona, ces signes rappellent la dure récession du début des années 1980.
Les centres commerciaux de quartier, plus petits que les malls où l'on trouve les plus grands magasins, sont les plus touchés. En moyenne plus de 10 % de ces espaces commerciaux se trouvent vides aujourd'hui, contre quelque 8 % l'an passé. Les grands centres, où se tiennent côte à côte des supermarchés alimentaires comme Safeway ou Publix et des grandes enseignes comme JC Penney, Macy's ou Target, souffrent aussi. Leur taux d'occupation est tombé en moyenne en dessous de 90 %. Le prix moyen des loyers accuse son plongeon le plus marqué depuis au moins dix ans.
Autour de Washington, les prix demandés par les propriétaires ont reculé de plus de 7 % en trois ans. La poursuite malgré ce contexte de nombreux projets de construction permet d'anticiper une hausse de l'offre dans les prochains mois, propice à un prolongement de la chute des loyers.
La nouvelle baisse en septembre des ventes de Macy's, Gap, Banana Republic et JC Penney confirme la sévérité du repli de certaines dépenses de consommation dans un climat de hausse du chômage et d'érosion de la confiance des Américains, au plus bas depuis le printemps. Si l'on ne tient pas compte du secteur automobile et des ventes d'essence, les affaires de nombre de détaillants se détériorent toujours. Le spectaculaire rebond de Wall Street n'a pour l'instant pas redonné le moral aux consommateurs.
La Réserve fédérale préoccupée
L'impact de cette tendance sur les banques alarme les autorités. « La crise de l'immobilier commercial commence à éclipser celle du crédit immobilier résidentiel en tant que cause principale des pertes des banques », affirme Sheila Bair, présidente du Fonds fédéral de garantie des dépôts bancaires (FDIC). Depuis le début de l'année, cette institution a dépensé plus de 25 milliards de dollars lors de la saisie d'une centaine de banques. Il s'agit essentiellement de petits établissements régionaux très dépendants du secteur de la construction commerciale. Le faible niveau de provisionnement de centaines de ces banques au regard de leur exposition au risque immobilier préoccupe aussi la Réserve fédérale.Plus de la moitié des 3 400 milliards de dollars de dettes du secteur est détenue par des banques. Or la valeur des prêts affichée dans leurs bilans a généralement moins baissé que les prix des propriétés. Cette réticence des banques à reconnaître la détérioration effective de leurs actifs fait craindre un nouveau sursaut de pertes trimestrielles et rend encore plus urgente leur levée de fonds propres.