Contribuables: quels impôts demain ?
Par Corinne Lhaïk, mis à jour le 15/10/2008 15:37:18 - publié le 15/10/2008 15:08
En supplémentQuel que soit le montant des emprunts que l'Etat devra réaliser, la charge de la dette est appelée à grossir encore. Et il faudra bien la rembourser.
Nationalisations des banques, garanties de leurs dettes et des dépôts de leurs clients : les Etats sont sur tous les fronts, valsant avec ces milliards qu'ils sont les seuls, aujourd'hui, à pouvoir emprunter. Les Etats ? C'est-à-dire les contribuables, puisque les dettes d'aujourd'hui font les impôts de demain.
En Europe, la facture s'élève à 1 700 milliards d'euros, dont 480 pour l'Allemagne, 380 pour le Royaume-Uni et 360 pour la France. Les dettes de ces pays vont-elles grossir d'autant ? Dans le cas de la France, les 360 milliards annoncés correspondent à ce que l'Etat est autorisé à emprunter pour sauver son système bancaire. Sous deux formes différentes. A hauteur de 320 milliards, il s'agit d'une garantie indirecte donnée aux prêts entre banques. Ce chiffre est le résultat de savants calculs effectués à partir du montant global des crédits à l'économie (500 milliards d'euros). En pratique, les montants empruntés seront d'autant plus élevés que les banques continueront à se méfier les unes des autres.
Le second poste, 40 milliards d'euros, permettra à l'Etat de recapitaliser les banques. Là encore, il est impossible de savoir à l'avance à quelle hauteur cette possibilité jouera. Mais le gouvernement fait remarquer qu'une fois actionnaire de ces établissements il peut espérer une plus-value, lorsque après la crise, il vendra ses titres. Ce qui fait dire à l'économiste Charles Wyplosz qu'il y a « une bonne et une mauvaise dette. Quand un pays emprunte pour investir - et là, on investit dans l'évitement de la catastrophe - on est dans le premier cas de figure ».
Bon ou pas, tout nouvel emprunt viendra alourdir la charge de la dette, le deuxième poste de dépenses de l'Etat, avec 44,3 milliards d'euros prévus pour 2009 avant tout impact de la crise financière.
De plus, il est fort probable que ce montant augmente du fait de la crise économique : plus de dépenses sociales et moins de recettes fiscales vont dégrader les finances publiques. Actuellement, le ministre du Budget, Eric Woerth, continue de prévoir un déficit égal à 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2008 et en 2009, malgré la récession annoncée. En 1993, avec un recul du PIB de 0,9 %, ce chiffre avait grimpé à 6 %.
A force d'emprunter, les Etats seront-ils contraints de rémunérer davantage leurs prêteurs ? Une récente étude (datée du 1er octobre) de Standard & Poor's, agence de notation qui surveille la qualité des emprunteurs, estimait que les pays européens (à l'exception de l'Islande) ne fragilisaient pas leurs finances publiques en renflouant leurs banques. Cette analyse soulignait même que l'impact financier du vieillissement de la population représentait une menace plus sérieuse que la crise financière actuelle. L'avalanche de milliards déversés ces derniers jours conduira-t-elle cette agence - ou ses concurrentes - à modifier son jugement ?