Retraite : l'épreuve de la rue
22/05/2008 | Mise à jour : 16:10 | Commentaires 55
Les syndicats manifestent ce jeudi contre les 41 ans de cotisation.
La barre est placée haut. Pour cette journée d'action et de manifestations des syndicats contre le projet gouvernemental sur les retraites, présenté fin avril, le secrétaire général de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, «espère plus de 500 000 manifestants». À la CGT, pas d'objectif précis, mais on espère que les participants aux défilés se compteront en centaines de milliers. À titre de «référence», au plus fort de la contestation contre la réforme Fillon de 2003, les manifestations avaient rassemblé entre un et deux millions de personnes.
Aujourd'hui, c'est l'ensemble des syndicats qui appelle à manifester, dans le public comme dans le privé, pour s'opposer à l'allongement à 41 ans de la durée de cotisation nécessaire pour toucher une retraite à taux plein. Les cinq confédérations (CGT, CFDT, FO, CFTC, CFE-CGC), la FSU, Solidaires et l'Unsa ont fixé comme mot d'ordre «la défense de la retraite solidaire». À Paris, le cortège partira de Bastille à 14 h 30, direction Saint-Augustin.
Pour le gouvernement et l'Élysée, cette journée a l'allure d'un double test. Elle montrera l'efficacité ou l'inutilité de l'instauration d'un service minimum dans les transports, un dossier phare porté dans la foulée de la présidentielle. Elle montrera également sa capacité à tenir face à la rue.
Fermeté à l'Élysée
À la veille de cette journée de mobilisation, l'Élysée ne tenait évidemment pas à faire de pari sur le nombre de manifestants. Mais, tout en estimant qu'il faut «laisser les uns et les autres s'exprimer», l'entourage du président de la République se montre ferme. Alors que le Parti socialiste a réitéré hier son soutien au mouvement et rappelé «son attachement, en l'état actuel, à l'accès à une retraite à 60 ans moyennant 40 annuités de cotisation», l'Élysée rappelle comme en écho que «le principe de la réforme a été réaffirmé pendant la campagne présidentielle et que l'engagement de réformer les retraites tient à cœur à la majorité».«Tout cela n'exclut pas un passage en douceur et de bonnes relations avec les organisations syndicales», ajoute-t-on dans l'entourage de Sarkozy. Les thèmes de frictions entre les syndicats et le chef de l'État sont potentiellement nombreux pouvoir d'achat, 35 heures, colère des marins-pêcheurs, offre «raisonnable» d'emploi… , mais l'Élysée rappelle que «le président de la République a la légitimité populaire» pour agir.
«Comme au moment de la réforme des régimes spéciaux, notre détermination est entière. Mais j'ai toujours le même souci de maintenir le dialogue, car beaucoup de sujets, comme l'emploi des seniors, restent encore ouverts», explique de son côté Xavier Bertrand, le ministre du Travail.
Hier soir sur France 2, François Fillon s'est dit, quant à lui, «très attentif» à la journée d'aujourd'hui. Mais il a aussi laissé entendre qu'il maintiendrait le cap. «La question a été tranchée en 2003 et le passage à 41 ans de cotisation a été acté par un accord», a-t-il rappelé.
Malgré des nuances essentielles entre eux sur le fond, les syndicats se veulent également très déterminés. Dans la fonction publique, il leur sera peut-être difficile de remobiliser pour la deuxième fois en une semaine. La mobilisation s'annonce moyenne à la SNCF ou à la RATP, où le gouvernement est parvenu à imposer non sans concessions la réforme des régimes spéciaux à l'automne, malgré neuf jours de grève. La SNCF annonce qu'elle fera circuler en moyenne un train sur deux. La RATP prévoit un trafic quasi normal sur l'ensemble des réseaux de bus, métro et RER à l'exception de la ligne B, où un train sur deux circulera. Des préavis de grève ont été déposés dans 53 autres réseaux de transports urbains, dont ceux de Lyon, Marseille, Toulouse, Rouen, Nancy, Nantes ou Grenoble. Air France précise que les vols intérieurs de et vers Orly pourraient être touchés.
En revanche, dans le privé, «incontestablement la participation sera très forte», assure le M. Retraite de la CGT, Jean-Christophe Le Duigou. «Plusieurs centaines d'arrêts de travail» auraient été déposées dans des secteurs comme la métallurgie, la chimie ou l'agroalimentaire.